Jacques Piquée : Le séneçon du Cap

Le séneçon du Cap
(Senecio inaequidens=S.harveianus)
de la famille des astéracées ou des composées

Synonyme : séneçon de Mazamet

Autour du 11 novembre, l’été de la St-Martin offre souvent de belles journées ensoleillées où la température atteint allègrement plus de 15 °C. Les abeilles en profitent pour effectuer des vols salutaires dits vols de propreté et parfois même pour encore butiner les dernières fleurs de la saison. Cependant, rares sont les plantes qui fleurissent encore en abondance aux marches de l’hiver. Le séneçon du Cap est une exception. Après avoir déjà fleuri une bonne partie de l’été, il semble trouver une deuxième jeunesse avec les pluies d’automne et continue de « jaunir» des talus entiers, des bords de chemin et parfois des endroits les plus insolites comme le ballast de chemin de fer ou les trottoirs en ville. Observer ses abeilles rentrer du pollen en novembre ne peut que réjouir l’apiculteur mais le séneçon du Cap est-il pour autant une plante vraiment recommandable ?

Étymologie

Le nom de genre provient de la racine latine senex qui désigne le vieillard. Qui dit vieillard dit aussi tête blanche, cheveux gris. Les infrutescences des séneçons sont des regroupements d’akènes munis d’aigrettes blanches évoquant la chevelure des personnes âgées.

Le nom spécifique vient également du latin qui signifie à dents inégales. Les feuilles linéaires du séneçon du Cap sont effectivement très irrégulièrement dentées.

Description

Le séneçon du Cap est une plante vivace herbacée à souche plus ou moins suffrutescente. Les tiges très ramifiées forment une masse compacte globuleuse de 60 à 80 cm de hauteur sur autant de largeur. Les feuilles alternes, linéaires sont sessiles et à base légèrement embrassante. Leur marge est plus ou moins dentée. Les fleurs jaune d’or sont réunies en capitules de type radié. La floraison se poursuit très tard en saison tant qu’il ne gèle pas trop fort. Les fruits sont des akènes munis d’une aigrette blanche et plumeuse. Ils sont très facilement disséminés par le vent (anémochorie) et par les mammifères au pelage dense (zoochorie). D’ailleurs, comme son nom l’indique, le séneçon du Cap est originaire d’Afrique du Sud. Il est arrivé en France fortuitement aux environs de 1934 dans la région de Mazamet (d’où son deuxième nom français) via des ballots de laine. De là, il s’est rapidement répandu dans la plupart des départements méridionaux et actuellement, profitant des couloirs de dissémination que constituent les grands axes autoroutiers, il remonte vers le nord.

On peut désormais l’observer dans la plupart des régions de France. Le séneçon du Cap est donc une plante exogène qui, comme beaucoup d’autres, divise les apiculteurs et les écologues. En effet, s’il s’agit bien d’une plante mellifère, le séneçon de Mazamet présente tous les critères de la plante invasive dangereuse pour la biodiversité :

– il forme de nombreuses graines (les spécialistes en comptent de 10 000 à 30 000 par plant) qui se propagent rapidement grâce au vent.

– il résiste aux incendies qui dans certains secteurs semblent même le favoriser en éliminant la concurrence des espèces indigènes.

– il ne possède pas de prédateur car il est toxique pour la plupart des mammifères herbivores et notamment pour les lapins, et pour les équidés.

– il secrète des substances inhibitrices qui éliminent progressivement la flore locale.

En conclusion, le séneçon du Cap est une plante dont on doit absolument éviter la propagation.

Le saviez-vous ?
Le séneçon du Cap existe sous une forme diploïde et une version tétraploïde plus agressive présente dans toute l’Europe.

Il existe des espèces locales de séneçon qui sont mellifères et non invasives. Entre autres, on peut citer le séneçon à feuilles de roquette (Senecio erucifolia). Il se distingue du séneçon du Cap par ses feuilles très découpées.

Jacques Piquée